little hans

La rencontre de l’enfant avec le réel de la sexualité

Özgür Öğütcen

Le dimanche, 17 septembre 2017, Symposium sur Lacan.

Dans le Séminaire XI, Lacan répond à l’évaluation de Françoise Dolto qui disait qu’on ne peut pas comprendre les fantasmes à propos de la « castration » sans penser à des « stades » ou à des étapes de « développement » – je cite, ici, Lacan parce que je pense que sa pensée est importante :

« La description des stades, formateurs de la libido, ne doit pas être référée à une pseudo-maturation naturelle, qui reste toujours opaque. Les stades s’organisent autour de l’angoisse de castration. Le fait copulatoire de l’introduction de la sexualité est traumatisant – voilà un accroc de taille – et il a une fonction organisatrice pour le développement.

« L’angoisse de castration est comme un fil qui perfore toutes les étapes du développement. Elle oriente les relations qui sont antérieures à son apparition proprement dite – sevrage, discipline anale, etc. Elle cristallise chacun de ces moments dans une dialectique qui a pour centre une mauvaise rencontre. Si les stades sont consistants, c’est en fonction de leur registration possible en termes de mauvaise rencontre.

« La mauvaise rencontre centrale est au niveau du sexuel. Cela ne veut pas dire que les stades prennent une teinte sexuelle qui se diffuserait à partir de l’angoisse de castration. C’est au contraire parce que cette empathie ne se produit pas, qu’on parle de trauma et de scène primitive[1]

La mauvaise rencontre dont parle Lacan est dustukhia. Eh bien, quel est alors ce dustukhia et pourquoi est-il une mauvaise rencontre ? L’importance de ma citation ci-dessus peut être comprise dans le contexte de ces deux questions. Et il existe un postulat dans cette citation : l’idée d’une maturation régulière et linéaire ainsi que l’idée de la progression d’un stade vers un autre est rejetées. Ceci n’est pas qu’un esprit hégélien qui s’ouvre puisse atteindre ou progresser vers une synthèse dialectique. La sexualité est toujours liée a ce qui est trebuché a ce qui est problematique. Nous pouvons le constater tout simplement par une observation quotidienne, l’idée d’une « vie sexuelle génitale heureuse et mature » pourrait être un fantasme de bonne foi.

Avant de passer à la raison pour laquelle la mauvaise rencontre est « mauvaise », nous devons commencer par examiner ce qu’est « l’idée sexuelle » de Lacan. La catégorie du « sexuel », en fait, est le concept central au cœur de la découverte de Freud. C’est l’une des choses les plus fondamentales qui ont structuré la psychanalyse. Pour Freud, le sexuel et, bien sûr, la sexualité infantile est le cœur et la base de la formation de la névrose. Alors nous pouvons poser notre question de cette façon : est-ce que la mauvaise rencontre avec la sexualité pour l’enfant, à ce niveau, est-elle une rencontre avec le plaisir, ou bien est-ce autre chose ? Avec qui, avec quoi, quels agents rencontrent l’enfant dans le contexte de sa propre sexualité ? Lorsque nous répondrons à ces questions, nous comprendrons mieux pourquoi Lacan rejette la notion de stades-linéaires-développés des postfreudien. Lacan dira que ce qui coupe tout ce développement « harmonieux » est la castration.

Si nous retournons chez l’enfant et sa sexualité, tout d’abord, nous avons la célèbre histoire de cas de Freud : le Petit Hans. Cette histoire de cas, c’est-à-dire du Petit Hans, nous montre que, dès le début, son expérience sexuelle n’est pas une mauvaise rencontre. Hans ne fait qu’expérimenter la sexualité et cela lui plait. En disant qu’il ne fait qu’expérimenter, j’aimerais dire que cette expérience n’a pas été traitée par un mécontentement pour Hans, mais qu’au contraire, il a vécu cela directement. Hans porte une curiosité pour les « faits-pipis » et, bien sûr, sur son fait-pipi. Freud dira au sujet de cet intérêt que « L’intérêt qu’il porte au fait-pipi n’est cependant pas purement théorique ; comme on pouvait le supposer, cet intérêt le pousse à des attouchements du membre. »[2]. Il touche alors son organe et prend plaisir à faire cela, et accueille avec enthousiasme l’attouchement de son fait-pipi par sa mère en lui répondant : « Mais très amusant ! »[3]. Cependant, cette expérience plutôt enthousiaste n’est pas encore une mauvaise rencontre pour lui, pour ainsi dire ce n’est pas un « traumatisme ». Sa mère le trouva, un jour, à l’âge de 3 ans et demi la main sur son pénis et le menaça : « Si tu fais ça, je ferai venir le Dr A… qui te coupera ton fait-pipi. Avec quoi feras-tu alors pipi ? »[4]. Voilà le moment et les autres moments où débuta le mécontentement quant à l’attouchement de son pénis. Ceci ne provenait pas d’Hans lui-même en premier, mais de sa mère, de l’Autre. C’est justement à ce stade qu’Hans fait face à une distinction, « les expériences qui donnent du plaisir et qui sont acceptées par l’Autre » et « les expériences qui donnent du plaisir mais qui ne sont pas acceptées par l’Autre ». Ceci est une distinction et cette distinction comprend : Hans, son pénis qui donne du plaisir et sa mère-l’Autre et son interdiction. Ou bien on peut dire, le corpo-Réel de Hans et l’Autre font face. La demande qu’exprime sa mère, « retire ta main de ton pénis » vient frapper le Réel de son corps. Le plaisir est un phénomène secondaire qui est interdit ici. Je pense que nous pouvons marquer ce point comme l’érotisation du corps qui était non « sexuel » et qui est directement expérimenté. C’est à partir de ce point que la rencontre commence à devenir dustuchia, une mauvaise rencontre.

Lacan, lors de sa Conférence de Genève sur le Symptôme, se référa à la notion d’autoérotisme de Freud et dira : « Et il a cru pouvoir accentuer notamment le terme d’autoérotisme, en ceci que cette réalité sexuelle, l’enfant la découvre d’abord sur son propre corps. Je me permets – cela ne m’arrive pas tous les jours – de n’être pas d’accord – et ceci au nom de l’œuvre de Freud lui-même. ». Ce qu’appelle Freud d’autoérotique n’a rien d’« auto » selon Lacan, l’expérience que vit l’enfant avec son propre corps ne concerne pas seulement son propre corps. Hans ne sait pas comment appeler son fait-pipi, son propre Wiwimacher et il ne sait pas que faire de ses premières érections qui lui causent des problèmes. Mais je pense que cela ne se produit pas en premier lieu, cela arrive après l’intervention de l’Autre, qui se transforme après par une mauvaise rencontre. Dans les mêmes textes, Lacan continue dans le même contexte que Hans. Ici, je produis une longue citation de Lacan à la Conférence de Genève sur le Symptôme :

« Il n’y a besoin que de savoir que chez certains êtres, qu’on les appelle, la rencontre avec leur propre érection n’est pas du tout autoérotique. Elle est tout ce qu’il y a de plus hétéro. Ils se disent – Mais qu’est-ce que c’est que ça ? Et ils se le disent si bien que ce pauvre petit Hans ne pense qu’à ce ça – l’incarner dans des objets tout ce qu’il y a de plus externes, à savoir dans ce cheval qui piaffe, qui rue, qui se renverse, qui tombe par terre. Ce cheval qui va et vient, qui a une certaine façon de glisser le long des quais en tirant un chariot, est tout ce qu’il y a de plus exemplaire pour lui de ce à quoi il a affaire, et auquel il ne comprend exactement rien, grâce au fait, bien sûr, qu’il a un certain type de mère et un certain type de père. Son symptôme, c’est l’expression, la signification de ce rejet.

« Ce rejet ne mérite pas du tout d’être épinglé de l’autoérotisme, sous ce seul prétexte qu’après tout ce Wiwimacher, il l’a, accroché quelque part au bas de son ventre. La jouissance qui est résultée de ce Wiwimacher lui est étrangère, au point d’être au principe de sa phobie. Phobie veut dire qu’il en a la trouille. L’intervention du professeur Freud médiée par le père est tout un truquage, qui n’a qu’un seul mérite, c’est d’avoir réussi. Il arrivera à faire supporter la petite queue par quelqu’un d’autre, à savoir en l’occasion sa petite sœur. »[5]

Comme vous pouvez le voir, Lacan dira que la chose qu’appelle Freud autoérotisme est l’hétéro-érotisme, qu’elle est étrangère au sujet, qu’elle est difficile à comprendre et qu’elle ne vient pas de soi-même. Parce que le Réel qui ne rencontre pas le Symbolique ne peut pas se trouver une expression pour lui-même, nous pouvons donc en déduire ceci : la pensée que le Réel est quelque chose qui ne peut être exprimé par le Symbolique est en inférence avec ceci : le Symbolique rend incomplet le Réel, c’est-à-dire que le Réel est même le manque qu’il y a dans le Symbolique, le manque qu’il y aurait dans le Symbolique exprimera alors un manque. Ainsi, l’incarnation du Réel lui-même se fera, de manière négative, par la relation entre le Symbolique et le manque qu’il existe en son sein, sinon il n‘existe pas d’incarnation en lui-même. Selon moi, c’est pour cette raison que le plaisir du corps (du corpo-Real) présent chez Hans, ou chez tous les sujets, se présente comme une question de sens pour lui-même. La menace de sa mère à Hans : « le Dr A… qui te coupera ton fait-pipi », traduit ce qui est impossible à ce qui est « interdit », certes le deuxième est une situation différente du premier. Mais, ici, un problème surgit alors, pourquoi inscrire quelque chose qui est impossible dans la catégorie des choses interdites ? L’impossible n’exprime-t-il pas suffisamment une situation qui est impossible ? C’est justement ce point qui est très important ! L’interdit est le point de rencontre avec le Réel et le Symbolique pour le sujet. Si cela n’avait pas été le cas, comment le Réel du corps aurait pu rencontrer avec le Symbolique ? Cela est seulement la demande de l’Autre – c’est-à-dire, la demande de la mère d’Hans « de retirer sa main de son fait-pipi » – il se réfère au désire de l’Autre, ce qui doit être lu et compris mais qui ne doit en aucun cas s’être emparé, c’est le Réel de la Symbolique. En conséquence, deux chemins se tracent pour le petit Hans : accepter la demande de l’Autre ou bien s’y opposer. Il s’agit d’un processus difficile, et ce n’est pas parce que cela a été dit une fois qu’il s’inclinera à cette demande. C’est donc la rencontre du plaisir du corps avec la castration, autrement dit, c’est l’expression d’une perte de jouissance. Étant donné qu’Hans a des problèmes pour compléter ce processus, une phobie du cheval émergera et soutient l’achèvement de ce processus. Le corps et le plaisir ne sont pas seuls, il y a également l’Autre, ici, et la menace de castration prononcée par la bouche de l’Autre. Ainsi, l’expérience d’Hans « se sexualise » et devient « hétéro ». On peut prendre également ici l’exemple de l’histoire de l’Homme aux rats qu’il était fasciné quand il avait vécu la quelque chose similaire dans son enfance lorsqu’il s’était glissé sous la jupe de sa baby-sitter et où il avait « été envouté » par son organe. Cependant, immédiatement après cela, le désir de voir des femmes nues se réveille en lui, c’est pourquoi il s’inquiète que ses parents comprennent et lisent dans ses pensées. Comme nous l’avons vu, l’expérience « fascinante » pour lui se transforme en dustukhia, ce qui lui fait de la peine. Ce qui lui pose problème, comme cela avait été le cas avec Hans, c’est sa propre érection, il ira même un jour demander à sa mère ce que cela signifie, c’est-à-dire il demande la signification à l’Autre. Encore une fois, nous voyons ici une séparation en deux voies : qu’est-ce qui sera fait avec cette expérience ? Est-ce légitime, ou ne l’est-il pas ?

Comme nous avons pu le voir dans la réponse que donne Lacan à Dolto « Le fait copulatoire de l’introduction de la sexualité est traumatisant … ». Ici, le concept de « traumatisme » apparaît, mais qu’est-ce que cela signifie ? Selon Freud ce qui est traumatisant : a) le fait que l’enfant voit les parents vivre des relations sexuelles – ou de pressentir cela – est traumatisant, b) le fait qu’il rencontre son propre plaisir sexuel est traumatisant et c) le fait que l’apparition de la possibilité de vivre des relations sexuelles à l’adolescence est traumatisant. Comme nous l’avons vu, selon Freud le « traumatisme » ne repose pas sur aucune séduction réelle – au début c’était sa pensée mais il l’a très vite abandonné : cette expérience qui crée un trauma ne peut être traitée avec des moyens Symboliques ou par les signifiants. Ici, au regard de l’enfant, il y a un excès, un excédent. Freud nota que ces premières rencontres avec la sexualité étaient pour les enfants obsessionnels « extrêmement plaisants » tandis que pour les enfants hystériques, cela était « dégoûtant ». En réalité, est-ce que ces deux attitudes – le plaisir extrême et le dégoût – ne peuvent-ils pas être considérées comme des attitudes défensives envers l’incapacité à vivre la sexualité ? Cela ne signifie-t-il pas une sorte de maniement du traumatisme créé par la rencontre de la sexualité infantile ? En d’autres termes, cela correspond à la séparation en deux stratégies différentes du sujet névrotique soit d’une manière hystérique ou soit d’une manière obsessionnelle : obsessionnelle en ce qu’elle essaye de compenser l’influence de la perte de la jouissance chez le sujet et hystérique en ce qu’elle essaye de compenser son influence sur l’Autre.

Freud soutient foncièrement que ces attitudes engendrées envers la sexualité sont distinguées par ces deux types de névrose et que ce concept construit « le noyau de la névrose ». Lacan complétera cette déclaration avec ce postulat : ceci n’est pas une « psychologie du développement », le fil de la castration parcourra tous ces soi-disant stades du début jusqu’à la fin et il troublera leurs stabilités. Je pense qu’il existe des résultats cliniques très importantes de cette conclusion de Lacan : Lacan se distingue ainsi avec sa clinique lacanienne de la clinique postfreudienne, et ainsi de leur triplet adaptation-progression-maturation. En refusant une partie spécifique du terme autoérotisme – et en soulignant qu’il s’agit bien d’hétéroérotisme – il dira que la sexualité de l’enfant est dès le début confrontée à l’agent du Symbolique , mais il le fait en conservant son propre concept de Vérité. Ici, pour Lacan, dans un certain sens, c’est le point de connexion entre le Réel et le Symbolique et entre le désir et la demande.

La catégorie lacanienne de « la réalité sexuelle » trouve sa place dans le Séminaire XI dans la réalité inconsciente qui s’exprime par la réalité sexuelle. Lacan dira « le transfert, c’est la mise en acte de la réalité de l’inconscience » . Ensuite, il mettra en évidence la thèse selon laquelle la réalité de l’inconscience est la réalité sexuelle. L’utilisation du terme « Réalité » et non « Réel » par Lacan est un point important. Sur ce point, je peux proposer ma propre idée : parce que par l’utilisation du mot « réalité », il distingue la perception qui vient avant l’inconscient, qui vient avant les paroles de l’Autre, c’est-à-dire il distingue le Réel de la réalité. D’où savons-nous cela ? Parce que, dans la suite de ce débat, il se concentre sur le sujet de la représentation de l’inconscience : Vorstellungrepräsentanz. La réalité de l’inconscient, signifie l’inconscient, c’est-à-dire, selon Lacan, c’est ce qui est Reprasentänz tandis que le Réel lacanienne, c’est le Vorstellung. Reprasentänz c’est “ce qui représente la représentation”, c’est-à-dire que c’est le Vorstellung du Reprasentänz. De cette manière, nous pouvons constater que ceux qui sont au niveau de l’Autre ne sont pas au même niveau que ceux qui sont au niveau “Réel”. Dans les propos que Lacan a tenu dans la Conférence sur le Symptôme que j’ai cité précedemment, il disait que tout le monde a des premiers plaisirs sexuels et ainsi Freud dans sa découverte sur l’inconscience que disaient que ces derniers sont “généralement chez tout le monde”. Donc, je pense que cela soutient d’une certaine manière cette thèse : si le plaisir existe chez tout le monde, l’inconscience aussi existe chez tout le monde, et c’est ce “premier plaisir” qui se révèle chez tout le monde. Freud n’hésite pas à faire des généralisations et Lacan, sur ce point, dira que cette généralisation est suffisante pour les psychanalystes qu’ils veulent construire quelque chose en relation avec l’inconscience. Ainsi, il rajoutera : “L’inconscient est une invention au sens où c’est une découverte, qui est liée à la rencontre que font avec leur propre érection certains êtres.[6] Par ce postulat, nous pouvons dire que la rencontre du corps avec le plaisir – c’est-à-dire, s’il est légitime de dire avec le Réel – est lié à l’inclusion de l’Autre, c’est-à-dire de la castration, c’est-à-dire de la perte de la jouissance.

Ici, nous pouvons induire encore une autre déduction : il advient d’une séparation, une rupture entre la demande de l’Autre et le désir de l’Autre. Tout ces processus en fonctionnant à l’envers conduit à ce que le plaisir qu’expérimente directement l’enfant soit infiltré par l’Autre, et l’enfant évalue cette expérience en fonction de la Loi qui définit ce qui est interdit et ce qui ne l’est pas. Le plaisir du corps est sans aucun doute une perception dans le corps, de sorte que cette perception devient une “idée incompatible” qui ne doit pas être atteinte à la conscience. C’est cette “idée incompatible” qui est réfoulée, et, par conséquent, Hans, devenu un jeune homme rencontrera plus tard Freud et où il lui dira qu’il ne se rappelle plus de rien concernant cette période, cette période d’analyse. Colette Soler soulignera que le concept d’“idées incompatible” de Freud est indubitablement lié au sexe.[7]

Il est important de souligner que la catérogie “sexuelle”, dès le début, n’est pas prévue pour l’enfant, le “sexuel” se produit par la rencontre du “Réel” du corps avec la “Symbolique” de l’Autre, sinon ce n’est que l’expérience du corps. Pour qu’elle devienne privilégiée, l’interdiction doit s’imposer sur ce plaisir, de sorte que, par exemple, l’interdiction sur le fait de manger de la nourriture ou encore l’interdiction sur ce qui est anal peuvent être sexualisés. Sinon, les êtres humains ne seraient pas différents des animaux. Les plaisirs oraux et anaux qui sont sexualisés sont rétrospectivemets des jouissances, de sorte que la nourriture consommée dans le rêve peut avoir une signification sexuelle; sinon cela signifierait que le fait de manger, ce ne serait qu’assouvir un besoin.

Dustukhia n’est pas une mauvaise rencontre au niveau des besoins, c’est une mauvaise rencontre au niveau de la rencontre de l’enfant avec la Loi et avec L’interdiction (en turc la loi c’est yasa et l’interdiction c’est yasak. J’écris Yasa(k) pour indiquer les deux en meme temps) et cela est lié avec la transmission du message que le plaisir est mauvais, qu’il est inacceptable. Selon ce que nous savons d’apres la clinique, le sujet, après ce stade, ne peut expérimenter la sexualité comme un phénomène stable et mature. Il se référa toujours à un manque, à une déficience, à un excès ou à un rareté, ou bien carrément à une résistance ou à une soumission. Un sujet névrotique tentera de regagner cette perte de jouissance de différentes manières, par exemple en les retournant dans ses rêves ou encore dans ses fantasmes. De toute évidence être castré une fois montre l’irréversibilité de la castration mais à côté de cela, il nous montre le désir d’y retourner et il montre aussi la nostalgie. Par exemple, l’Homme aux rats qui, après avoir travaillé toute la nuit, tient son penis erecté devant le miroir et ouvre la porte extérieure pour attendre que le fantôme de son père arrive, même si cela n’arrivera jamais. Cet exemple nous montre la jouissance furtive. Lui, continue à jouir sous le nez de l’Autre, mais ce n’est pas une jouissance absolue, sans manque, ce n’est absolument pas une jouissance complète. Il a été réduit, coupé, résumé, détourné de son chemin.

Pour Freud, la sexualité infantile qui est aussi soutenu par le fantasme, comme le réveil de l’adolescence est en meme temps un phénomène biologique. D’autre part, la relation entre la biologie et la fantasme reste opaque : la ressemblance et la difference de la sexualité infantile et de la sexualité des adultes ne sont pas encore claire. L’impasse de la castration chez Freud peut être attribuée à l’absence d’une articulation adéquate entre l’impulsion et la sexualité.

Freud nous a appris que les théories sexuelles de l’enfance ne concernent pas seulement l’enfance. L’enfantil constitue le noyau de la structure du sujet, indépendamment de l’âge chronologique (généralement qui est spécifique à la sexualité) il s’appuie sur la vérité de la femme et de l’homme. C’est pour cette raison qu’il n’existe pas de limite claire qui sépare l’enfance de l’âge adulte. C’est peut-être pour cette raison qu’il n’existe pas d’hystérie de l’enfance mais bien une « hystérie » car « l’enfant est père de l’Homme ». La sexualité infantil n’est pas un espace propre, complètement déconnecté de la sexualité des adultes.

Un jour pour l’enfant la rencontre avec la sexualité prend un mauvais tour, le plaisir qu’elle donne devient controversé : les choses qui étaient présentes dans le passé font souffrir et deviennent cause de problèmes. Cette répétition menaçante se révéle dans les cauchemars. Ainsi le plaisir connu et familier deviendra la chose la plus étrangère, la plus effrayante.

Freud affirme que les théories sexuelles infantiles, même si elles sont fausses, contiennent une vérité en elles, elles répondent aux mêmes questions que les adultes posent. Ces questions sont des questions auxquelles il est difficile de répondre, elles sont au-delà de la compréhension. Les mythes ne sont-ils pas justement produits pour répondre à ces questions ? En d’autres termes, la « mythologie du cheval » du Petit Hans est la façon dont il traite de ces questions. C’est pour cette raison que la névrose infantile ne peut être considérée comme une question de thérapie qui doit être traitée tout de suite. La psychanalyse d’une certaine façon intervient pour que le sujet puisse produire lui-même une solution. C’est pour cette raison que la psychanalyse n’est pas une « thérapie », elle est thérapeutique, mais elle n’est pas une thérapie.

[1] Jacques LACAN, Séminaire XI, p.

[2] Sigmund FREUD, Le petit Hans.

[3] Ibid.

[4] Ibid.

[5] Jacques LACAN, La Conférence de Genève sur le Symptôme.

[6] Jacques LACAN, La Conférence de Genève sur le Symptôme.

[7] Colette SOLER, Hysteria and Obsession, p. 249.